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17 septembre 2007

Come-back

    Je suis enfin de retour parmi les vivants. Tout s'est tellement précipité que je n'ai pas eu le temps de poster le moindre article (même pas un p'tit adieu) avant mon départ pour le Beaujolais. J'ai tellement de choses à dire que je ne sais par où commencer... tien si en fait, par la fin. Les vendanges.

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    Départ de Paris jeudi 13 septembre, Gare de Lyon, à 16h. Cette conne de borne automatique m'a placé dans un "duplex", les quatre places en vis-à-vis... du coté de la fenêtre. Je me suis donc retrouvé bloqué entre trois gros gars en costards lisant le Figaro. La joie d'avoir un papa à la SCNF c'est de pouvoir prendre le train en 1ère classe pour pas très cher et de faire la nique à tous ces hommes d'affaires ou gros bourges, quand le contrôleur te fait un grand sourire alors qu'ils guettaient tous comme des vautours le moment où toi, petit jeune avec ton gros sac-à-dos pouilleux, allais te faire remettre manu-militari à ta place. 18h arrivée à Lyon, une heure de TER et de bus plus tard et me voilà à destination.

    L'ambiance est étrange cette année. Comme beaucoup de vignerons, R. souffrent de la crise qui touche le secteur viticole depuis quelques années. Pour ne rien arranger, les vignes ont subit la grêle durant l'été (deux ans de suite... les deux seules fois depuis 1968 :s). Résultat : la veille de commencer, nous n'étions que cinq dans les dortoirs qu'occupe d'habitude une vingtaine de vendangeurs. L'ambiance fut plus calme que prévu. Heureusement dans ces quatre autres personnes il y avait des têtes connues : Catherine, infirmière lyonnaise et Celine, une charmante jeune fille, super dynamique, du même âge que moi. Encore heureux qu'elle était là sinon j'aurais peut-être regretté d'être venu. A tous les deux on a réussit à se mettre assez d'ambiance pour oublier que l'on était seul.

14 septembre 2007, 6h30 - Début des hostilités.

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    Nuit de merde, encore une insomnie... au final je ne sais même pas si j'ai dormi. Tout est tellement silencieux ici, que ça peut en devenir assourdissant. Plus de scooter, de bus, de voitures, d'avions ou de clodos bourrés sous les fenêtres. Bref, le pied total. Celine est arrivée très tard. J'étais le seul encore réveillé donc elle s'est installée dans la même chambrée que moi, ce qui ne fut pas pour me déplaire. Qu'on ne s'y trompe pas, elle est déjà prise et j'étais surtout content d'avoir un peu de compagnie qui, il est vrai, n'était pas des plus désagréable. Etrangement, je me lève frais comme un gardon pour enfiler ma tenue de combat : chaussures de marches, pantalons treillis (et pas de chez Gucci hein), t-shirt déchiré et pull léger. C'est le premier vrai petit-déjeuné que je consommes depuis des semaines avec tartines de pain frais, confitures et miel maisons, chocolat chaud. La vue  sur la vallée de l'Azergues qu'offre la salle à manger est toujours aussi magnifique. La brume se lève en même temps que nous. Le travail commence à 7h30 par la vigne la plus chiatique de l'exploitation à vendanger. Imaginez un dénivelé de caillasses à 90° et vous aurez une petite idée de la manière dont on se déplace avec une hôte de 70kg de raisins sur le dos. Désormais j'ai le plus grand respect pour le boulot du Père Noël. C'est en m'agrippant d'un pied de vigne à l'autre que je virevoltais afin de recueillir la récolte de ma douzaine de camarades. évidemment, je me suis cassé la gueule au moins une fois. Le sol s'est dérobé sous mes pieds et si je n'avais pas été rattrapé au vol, je finissais les quatre fers en l'air dans le fossé qui se trouve quatre mètres plus bas. Au moins c'était fait, ce n'est plus arrivé. Les raisins sont secs, légers et peu nombreux. L'année ne s'annonce encore pas sous les meilleurs auspices. Producteur consciencieux oblige, une sélection stricte des grappes est effectuée à la coupe tout d'abord puis dans le bac. Cette dernière mission incombait à moi seul. Pas le temps de chômer. Quand vient 10h c'est l'heure de la pause, du casse-croûte, un rituel immuable qui est aussi pour moi l'un des meilleurs moments de la journée : tout le monde se réunit et échange autour d'un véritable petit pic-nique où l'on retrouve de quoi reprendre des forces. Au menu : pain frais, lard, terrine, moutarde, fromage de chèvre local, plaquettes de chocolat, le tout arrosé de vins rouge, blanc ou rosé, d'eau et de café au choix. Pour une fois, le vin à 10h du mat' m'a moyennement tenté, par contre je ne prend jamais autant de plaisir à boire de l'eau que pendant cette période. Boire pour compenser tout ce que je perds en travaillant, et encore, on est loin du compte. Midi et soir, c'est retour à la table pour déguster la délicieuse cuisine de Juliette, la cuisinière, qui nous propose des menus toujours très consistants, composés généralement de spécialités de la région. Je crois bien que je ne mange jamais autant qu'en allant faire les vendanges. Mon estomac s'adapte, je ne perds ni ne prend aucun kilo à mon grand désarroi et à l'étonnement permanent  de mes camarades sur ma physiologie. Comment un grand gaillard aussi fin peut-il supporter ce travail de mule toute la journée? Je ne sais pas, j'ai toujours été très endurant dans l'effort.

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    18h fin de la journée de travail. Tous le monde est HS, collant de jus de raisin, assoiffé et surtout particulièrement fourbu. La douche est alors LE moment de bonheur de la journée, surtout pour moi qui avait droit à un shampoing tous les soirs pour me décoller les cheveux du crâne entre le jus qui peux me couler dessus quand je vide la hôte d'un coup de rein et les maladroits, que je ne citerais pas, qui sont tellement bourrés qu'ils vident leur sceau sur ma tête plutôt que dans la hôte. Personne ne s'est coupé cette année... quand je dis que ce n'est plus ce que c'était. Autre rituel du soir, pendant le repas : les devinettes. R. sort une ou deux bouteilles de son cru, en retire les étiquettes avec soin et sert toute l'assemblée. Le jeu consiste à deviner l'année dont il s'agit. Un jeu qui n'est pas évident car, d'une année sur l'autre le vin peut-être très différent évidemment, mais surtout il faut aussi compter sur le vieillissement de celui-ci. Le Beaujolais est un vin qui se bois jeune mais il peut aussi se laisser vieillir s'il est de qualité comme celui que nous produisons. Je suis fier. Cette année j'en ai deviné deux : le 1995 (héhé et j'étais le seul sur ce coup là) et le 2005 (dont je ne raffole pas d'ailleurs). Je n'ai pas été très loin du 1999 en proposant 1997. Les réponses s'affinent au fil des repas. Il nous a même sorti une bouteille de 1987, ce qui commence à faire beaucoup. Avec Celine, on prenait un grand plaisir à boire pendant le repas du soir. Non pas pour s'enivrer bêtement, mais juste par plaisir du vin, pour comparer. Dès qu'une devinette s'approchait je me dépêchais de finir mon verre pour le remplir à nouveau. Elle ne s'embêtait pas avec ça et son verre d'eau finissait souvent dans la plante verte derrière elle. Pas de temps à perdre. L'aspect bénéfique du vin le soir était aussi son coté décontractant. Les douleurs se faisaient moins ressortir, les Dolipranes sont donc restés bien rangés dans ma trousse de toilette. Malgré le poids éreintant que m'incombait le travail de porteur (et qui me vaut aussi une petite plus-valu sur mon salaire) je n'ai pas eu spécialement mal au dos. Quelques hématomes au niveau des épaules et c'est tout. J'ai par-contre eu pas mal de courbatures au niveau des cuisses et des douleurs au niveau de la plante des pieds dut aux kilomètres que j'ai fais avec ma cargaison. Mine de rien j'ai pris du muscle. Je m'en suis aperçu en faisant ma petite gym matinal de ce matin : une vingtaine de pompes, d'abdos et de tractions supplémentaires, par rapport à d'habitude, sans efforts.

   Le soir c'était ping-pong (une tournante avec un coup dans le nez vous avez déjà essayé?), et discutions en attendant les vendangeurs d'une autre exploitation que l'on connait bien et qui ne sont jamais venus. Nouvelle preuve de la pauvreté de l'année : rien à fumer, tant pis. Les étoiles nous regardent de hauts. Le ciel est incroyablement dégagé de toute lumière parasite et les astres brillent de milles feux. Je crois n'avoir jamais  vu ailleurs une Voie Lactée aussi intense.

    Deux jours et demi plus tard, nous avions finis. Nous avons fait, pendant cette période, ce que l'on fait normalement en une semaine. Il n'y avait rien. L'année sera difficile pour R., fervent partisan de José Bové. Pour ne rien arranger, il a perdu un bon tiers de son Rosé pendant le pressage à cause d'une cuve fendu. Quand le sort s'acharne... Espérons que l'année prochaine sera meilleure. Il m'inquiète. Les derniers mots qu'il a échangé avec moi était sur le taux de suicide en expansion chez les viticulteurs. Joyeux. Je reçois mon chèque. Je n'étais pas venu pour ça. L'objectif est rempli : me vider la tête, changer d'air, voir des gens différents, bouger, me dépasser, voir du vert... Même si ce n'est plus ce que c'était, j'ai aimé. J'ai confiance en lui pour qu'il se relève, il a la hargne. C'est Celine qui m'a ramené directement à Lyon, échange de numéros de téléphone au cas où l'un voudrait venir squatter chez l'autre, ça peut toujours servir. C'est son anniversaire. A peine arrivée à la gare, je monte dans le premier TGV pour Paris. J'enrage quand je regarde mon billet... encore un duplex. Après avoir joué à Pierre Richard pendant quelques minutes avec mes bagages je me suis assis. Oh joie, Oh surprise ! Je suis seul. J'avais oublié qu'il y avait France-Namibie ce soir là. Quatre places à moi tout seul en 1ère, la classe c'est le cas de le dire. Juste sur ma droite, face à moi, une superbe jeune femme blonde... anglaise (c'est assez rare pour le préciser :p). Le voyage du retour fut court...

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