Désinformation du jour, Bonjour !

    Ce matin j'ai eu la folle ambition de partir de chez mes parents pour rentrer chez moi. Galère des transports pensez-vous. Un peu mais rien d'insurmontable. J'ai pris le train, à l'horaire indiqué la veille. Etrangement, ce train était moins rempli qu'en temps normal et pourtant c'était en heure de pointe. Arrivé à Paris, je n'ai même pas envisagé le métro. Une petite promenade à pied me fera le plus grand bien et je ne me suis pas trompé. C'est donc parti pour un trajet, qui n'a absolument rien d'insurmontable, entre la Gare de l'Est et les Halles. Simple et efficace, la rue Saint Denis offre le spectacle le plus représentatif de Paris au petit matin. Les épiciers arabes et les marchands de quatre saisons remplissent leurs étalages, les prostituées se relaient au bas des hôtels de passes alors que les éboueurs font leur tourné (des poubelles, pas des putes hein) Les lycéens trainent des pieds. Le passage Brady est toujours désert depuis l'incendie de la semaine dernière. Sûrement une des seules rues où une boutique de prêt-à-porter de luxe a pignon sur rue entre sex-shop et cinémas porno. Les poissonniers font le plein de glace pilée  et  la viande est déjà en train de rôtir dans les nombreux kebabs. Bref un réveil en douceur à Paris, non à 5h mais à 8h. Ce qui change? Le nombre de piéton en circulation. Les gens ont redécouvert l'utilité des trottoirs et de leurs chaussures. C'était quand même plus agréable que d'avoir la gueule collé à la vitre d'une rame de la ligne 4. Arrivé au Halles ça a été une autre paire de manche, les RER A se comptant sur les doigts d'une main. Plus d'une demi-heure d'attente pour une bonne surprise qui me permettra en fin de compte de retrouver mon domicile. Par contre impossible de repartir pour aller en cours, à une fac qui devait être fermée de toute façon. Bon, on est tous d'accord, ça fait chier. Mais on ne fait pas d'omelette sans casser des oeufs (même au sens propre). Il s'agit d'une lutte concrète et idéologique comme on essaie de le faire croire (d'ailleurs pour ça faudrait qu'il y ait des partis politiques de Gauche vivants ce qui n'est plus le cas dans ce pays). Même pour ce qui est de la mobilisation étudiante que les syndicats complètement dépassés, comme l'UNEF, tentent désespérément de récupérer.

    Au coeur actif de la mobilisation contre le CPE de l'an dernier, j'ai appris à me méfier des médias. Partir sur le terrain toute la journée et rentrer le soir pour voir aux infos des reportages complètement fantasmés, des images et des interviews détournés... bref communication rime avec désinformation. La propagande étatiste bat son plein depuis l'élection du nain de jardin ce n'est pas une découverte. On passera donc sur la grosse blague de TF1 qu'ils osent appeler le "13h". Non c'est trop gros.

    Mais alors passons à un petit exemple de désinformation quotidienne. Comme souvent je regarde C dans l'air de France 5, une émission pour laquelle j'ai beaucoup de respect (mais qui s'effrite au fur et à mesure des jours). Aujourd'hui, débat sur les grèves. Un professeur en histoire économique à Paris 1, Jacques Marseille, intervient, comme régulièrement, dans le débat du jour. Après l'avoir longuement écouté on se doute bien que son coeur bat pour la majorité présidentielle avec le laïus habituel sur ces salauds de fainéants prolétaires gauchistes qui sont biensûr tous des privilégiés, dangereux preneurs d'otages et dangereux terroristes pour la civilisation occidentale et rappelant qu'en Chine c'est pire. Jusque là toujours rien de nouveau sous le soleil, sauf que lorsque ça commence à parler chiffre j'ai littéralement bondi quand le sujets des étudiants en grève a été évoqué. Cet énergumène cite en exemple le vote électronique par internet qui a été pratiqué à Paris 1 sur le blocage (notamment de Tolbiac et la Sorbonne). Vote dont on ne doutera pas de la neutralité surtout quand la question est posé de la façon suivante :

Vous êtes ainsi invités à vous exprimer par approbation, opposition ou refus de choisir, sur la position suivante :
« Indépendamment de mon opinion sur la loi LRU et de mon souhait éventuel d'exprimer une opposition ou une approbation de cette loi, je considère comme inacceptable l'installation de piquets de grève et autres obstructions visant à interdire aux étudiants et enseignants qui le souhaitent l'accès aux locaux universitaires, au centre Pierre Mendes France comme sur tout site de l'université ».

Tout est dans la question, une bonne blague n'est-il pas?

    Alors ce monsieur, honorable enseignant de cette honorable institution qu'est la plus grande université de Paris (50.000 étudiants dont ma modeste personne) s'enthousiasme sur les résultats de ce vote : "les étudiants de mon université ont voté à 76% contre le blocage, ce qui montre bien que les étudiants sont massivement contre cette grève". Présenté comme ça on ne peut que le croire mais là où le bas blesse c'est qu'on ne précisera jamais au cour de l'émission que le taux de participation n'a été que de... 25% !!! Alors en quoi cette mascarade démontrerait que les étudiants sont massivement contre ce mouvement lorsque moins du quart d'entre eux se sont exprimés et que les grèvistes et bloqueurs ont largement autre chose à foutre que de consulter leurs mails (quand ils y ont accès) et honorer un vote qui n'a de légitimité qu'aux yeux de ceux qui l'organisent et qui sont parti prenant (même en présence d'huissier).

En quoi cette mascarade est-elle plus représentative qu'une AG qui est loin des images renvoyés par les médias nationaux?

Comme quoi d'un coté comme de l'autre, il est toujours facile de s'adjuger la parole de la majorité dite silencieuse, qui par définition est muette et dont on ne connait pas l'opinion. On dit tout ou rien, sinon ce n'est pas de l'info. On dit surtout n'importe quoi.

    Alors je tiens à le dire, je ne suis pas un bloqueur, mon centre n'est pas touché par la grève pour le moment. Mais dans l'opinion générale estudiantine, cette loi est assez mal comprise d'une part à cause des médias qui disent n'importe quoi, en particulier à travers des pseudo-experts qui ne maitrise pas du tout leurs sujets et qui ne servent qu'à adouber une désinformation de masse (je maîtrise mon sujet, je fais des études audiovisuelles et je peux vous dire que les JT on les décortique à la loupe, j'ai vraiment envie de vomir en ce moment et Arrêt sur image me manque vraiment). Mais la faute aussi aux syndicats qui ne font pas leur travail d'informations ne cherchant qu'à ramasser de nouveaux adhérents en simplifiant une question très complexe. Il y a du bon dans la loi LRU, mais comme bien souvent les vices sont dans les détails qui pervertissent l'ensemble. Rappelons que le début du mouvement n'avait que pour objectif de rediscuter calmement de certains points avant que le décret d'application ne soit définitivement voté. Chose qui a été catégoriquement refusé par Valérie Pecresse. Comme il est courant de le constater actuellement on ne peut pas discuter avec ce gouvernement de "dialogue" qui prône la méthode du "parle à ma main!"

    Rappelons qu'un mouvement social n'est pas un concours de popularité et que pour la première fois depuis longtemps, les gens luttent, non plus pour acquérir des droits, mais pour ne pas qu'on leur retire ceux qu'ils ont encore. La plus grande réussite de la Droite est d'avoir fait passer dans les esprits que la régression sociale était une avancée...